cadre technique :
Les spécifications techniques sont des documents qui définissent l’ensemble des prescriptions permettant de s’assurer de l’aptitude à l’emploi d’un produit. Elles sont constituées par les normes, les documents techniques unifiés (DTU), les agréments, les avis techniques, les certifications de conformité, les cahiers des clauses techniques générales (CCTG), le marquage (CE, NF) et les classements. Leur application, quand-elle n’est pas rendue explicitement obligatoire par la réglementation, dépend du contexte du projet et de la volonté du donneur d’ordre à les faire appliquer :
1. les normes :
Les normes marocaines produites par l’IMANOR jouissent de la supériorité territoriale.
Les normes françaises sont une production de l’AFNOR([1]) dans le cadre du décret 84-74 du 26 janvier 1984 et 93-1235 du 15 novembre 1993 et les normes européennes harmonisées sont établies par le CEN/CENELEC([2]) dans le cadre de la directive n° 89/106/CEE du Conseil du 21 décembre 1988, dite « directive produits de construction ».
Les normes([3]) sont un outil de prescription qui codifie l’état de l’art, et pérennise le ‘savoir-faire’ technique, ce qui renforce l’efficacité de la production. Leurs effets juridiques varient selon la nature des ouvrages (des arrêtés imposent le respect de normes dictées par les réglementations diverses dans les domaines de la sécurité, de l’hygiène, des conditions de travail, de la sécurité incendie, etc.), et/ou selon le statut du marché de travaux envisagé. En effet, pour les spécifications des marchés publics, le décret n° 84-74 du 26 janvier 1984 modifié prévoit une obligation de référence aux normes homologuées, et pour les marchés de travaux privés, la norme NF P03.001 définit un Cahier des Clauses Types comme Cahier Clauses Administratives Générales (CCAG) applicable aux travaux de bâtiment faisant l’objet de marchés privés. Dans son article 5, il est précisé que, « sauf dérogation dans les documents particuliers du marché, l’exécution des travaux traditionnels est soumise aux dispositions des DTU existants, et que les fournitures doivent répondre aux spécifications des Normes Françaises existantes ».
Ces normes se regroupent selon leur contenu en :
- ‘fondamentales’ lorsqu’elles traitent par exemple de terminologie ;
- ‘de spécification’ lorsqu’elles fixent les caractéristiques d’un produit et les seuils de performances à atteindre ;
- ‘d’organisation’ et ‘de service’ lorsqu’elles décrivent les fonctions de l’entreprise et leurs liaisons, et la modélisation des activités de service.
Elles s’apprêtent en France au regroupement selon leur statut :
- les Normes Françaises Homologuées, rendues obligatoires par un arrêté Ministériel publié au Journal Officiel. Elles sont applicables à tous comme un texte réglementaire ;
- les Normes expérimentales ;
- les fascicules de documentation ;
- les normes enregistrées faisant l’objet d’une procédure simplifiée.
Au niveau de l’Europe, les documents interprétatifs distinguent deux types de normes européennes harmonisées :
- les normes de catégorie A qui intéressent la conception ou la réalisation des ouvrages de bâtiment ou de génie civil et qui sont prises en vue de la satisfaction des exigences essentielles ;
- les normes (ainsi que les agréments et les guides d’agrément européens) de catégorie B, qui concernent les produits de construction soumis au marquage CE et à l’attestation de conformité.
Les ‘Eurocodes’([4]) sont des règles communes harmonisées de conception et de calcul des structures, destinées à favoriser les échanges dans le domaine des études et des travaux.
Depuis 1976, date du début de leur élaboration, les Eurocodes ont fait l’objet d’une cinquantaine de mandats pris dans le cadre de la directive ‘marchés publics de travaux’ (Directive n° 71/305 du 26 juillet 1971 complétée par la directive n° 93/37 du 14 juin 1993) pour constituer un ensemble homogène de normes utilisant les mêmes concepts en matière de sécurité d’ouvrage quel que soit le matériau de construction employé.
Les principaux sujets traités par ces documents sont les suivants :
- Eurocode 1 – bases de calcul et actions sur les structures ;
- Eurocode 2 – calcul des structures en béton ;
- Eurocode 3 – calcul des structures en acier ;
- Eurocode 4 – calcul des structures mixtes acier/béton ;
- Eurocode 5 – calcul des structures en bois ;
- Eurocode 6 – calcul des structures en maçonnerie ;
- Eurocode 7 – calcul géotechnique ;
- Eurocode 8 – conception et dimensionnement des structures pour la résistance aux séismes ;
- Eurocode 9 – calcul des structures en alliage d’aluminium.
Au niveau international, Il existe aussi deux organismes de normalisation à l’échelon mondial :
- l’organisation International de la Normalisation (Norme ISO) ;
- la Commission Électrotechnique Internationale (Norme CEI).
Ces organismes produisent :
- des rapports techniques ;
- des profils normalisés Internationaux ;
- des recommandations ;
- des guides.
Les normes ISO ou CEI peuvent être reprises dans la collection Française avec la référence NF ISO ou NF CEI ou NF ISO/CEI pour les publications communes.
Dans le cadre du suivi de ses productions normatives, l’Organisation internationale de normalisation se base sur une classification internationale qui répartit les normes en fonction du secteur d’activité d’application :
- Généralités, infrastructures et sciences ;
- Santé, sécurité et environnement ;
- Technologies industrielles ;
- Électronique, technologies de l’information et télécommunications ;
- Transport et distribution des biens ;
- Agriculture et technologies agroalimentaires ;
- Technologies des matériaux ; Construction ;
- Technologies spéciales.
La série des normes ISO 9000 normes d’organisation et de management sont inclues dans le seul groupe qui ne fait référence à aucun secteur d’activité spécifique : le groupe Généralités, infrastructures et sciences qui représente 9% des 13.000 normes internationales en vigueur.
2. Les documents techniques unifiés (DTU) :
Les Documents Techniques Unifiés sont des recueilles documentaires qui réunissent une bonne partie des ‘Règles de l’art’([5]) et techniques de construction dont le bien fondé est validé par l’expertise (test et/ou usage), pour chaque type d’ouvrage. Les Normes et les DTU sont complémentaires, car les premières définissent le produit et les seconds codifient sa mise en œuvre. Ces DTU, publiés dans les cahiers du Centre Scientifique et Technique du Bâtiment ‘CSTB’([6]), sont applicables aux marchés de la construction. Ils sont établis par l’ancien ‘groupe de coordination des textes techniques’, aujourd’hui transformé en ‘Commission générale de normalisation du bâtiment/DTU’, appelé également ‘CGNorbât-DTU’.
Les DTU sont généralement composés de trois parties répondant chacune à un objectif précis :
- Le cahier des clauses techniques (CCT) : Celles-ci réunissent l’ensemble des dispositions d’ordre technique nécessaires à la réalisation par l’entrepreneur chargé des travaux d’un ouvrage conforme à ce qu’on en attend sur le plan de ses fonctionnalités, de sa sécurité et de son comportement dans le temps dans des conditions normales d’utilisation. On y trouve des dispositions générales relatives au dimensionnement et le cas échéant aux tolérances, aux précautions spécifiques de mise en œuvre, et lorsque indispensable des dispositions relatives aux modes d’exécution.
- Le guide de choix des matériaux, produits ou composants à utiliser pour la réalisation de l’ouvrage (CGM) : Il s’agit d’identifier les natures, caractéristiques ou performances des fournitures, permettant la réalisation de l’ouvrage défini au CCT et conforme à ce que l’on en attend. Ceci peut se faire par référence aux normes définissant ces produits lorsqu’elles sont suffisantes pour déterminer l’adéquation des produits vis à vis des attentes exprimées pour l’ouvrage, ou en opérant un choix par rapport aux produits couverts par les normes en fonction de critères internes à ces normes ou externes lorsque celles ci ne contiennent pas les critères pertinents vis à vis de l’ouvrage. En l’absence de norme le CGM peut spécifier par un autre mode les caractéristiques des produits compatibles avec l’ouvrage concerné.
- Le Cahier des clauses spéciales (CCS): Il donne les clauses administratives générales telles que la liste des travaux qui font partie du marché (sauf si les documents particuliers n’indiquent le contraire), les dispositions de coordination avec les autres intervenants, les dispositions pour le règlement des contestations… Les clauses générales des DTU ont vocation à être éventuellement complétées par des clauses particulières que le maître de l’ouvrage peut souhaiter introduire dans son marché.
La valeur juridique des DTU est que, dans les marchés privés, ils ne peuvent être imposés que par voie contractuelle. La norme NF P 03-001 couramment utilisée rend obligatoire l’application des normes françaises homologuées, des DTU CCT et des DTU règles de calcul. Dans les marchés publics, les DTU sont imposés par voie réglementaire. Mais, quelque soit le marché concerné, un DTU rendu obligatoire par arrêté interministériel s’impose à tous. Et même si les DTU ne sont pas imposés par voie contractuelle, les experts s’en servent très fréquemment, en cas de litige, comme document de référence, leur non respect peut amener une compagnie d’assurance à se considérer comme dégagée de ses obligations.
L’harmonisation européenne a conduit le groupe DTU à s’insérer dans le système national de normalisation. Les DTU se transforment progressivement en normes. Ils prennent alors le statut de norme Française homologuée (HOM), de norme Expérimentales (EXP) ou de fascicule de documentation (FD).
Les DTU proposent des clauses techniques types pour les marchés de travaux relatifs à des ouvrages couramment réalisés avec les techniques communément maîtrisées par la communauté française des acteurs qualifiés de la construction.
Les normes européennes peuvent couvrir une gamme de produits plus large que ceux habituellement utilisés en France. En effet la norme européenne est censée couvrir les produits présents dans tous les pays de l’Union Européenne.
Aussi, le domaine d’application d’un DTU peut parfois ne concerner qu’une partie de la norme européenne (celle qui correspond aux produits dont les acteurs français ont l’expérience).
3. Les avis techniques :
Les avis techniques (Atec) servent à donner aux utilisateurs une assurance de qualité dans le domaine des produits innovants. Ils sont établis par des commissions d’experts spécialisés et délivrés par le CSTB. Ces avis (anciens Agréments) concernent des procédés et des matériaux nouveaux précisément définis et propres à la construction. Ils permettent de mieux connaître les qualités et les défauts de tous les produits utilisés et indiquent la faiblesse de certains éléments.
Le respect de ces prescriptions est une des conditions essentielles de validité de l’avis, dont il fait partie intégrante. Les Atec n’ont pas à être imposés de façon contractuelle. Les procédures de délivrance des Avis Techniques (ou Agréments) étant voisines dans les états Européens, une Union Européenne pour l’Agrément technique dans la construction s‘est constituée et établit des ‘’Guides techniques pour l’agrément’’ (ancienne directives) dont le respect permet à un avis délivré dans un État d’avoir cours dans d’autres États membres.
La procédure des Atec se révèle lourde et longue. C’est la raison pour laquelle une procédure plus souple et plus simple a été crée : l’appréciation technique d’expérimentation.
L’appréciation technique d’expérimentation (Atex) a pour but de contribuer au développement des innovations en leur facilitant l’accès à des applications expérimentales par l’obtention rapide d’une appréciation technique formulée par des experts sous l’égide du CSTB. L’atex est établie pour une courte durée ou pour un nombre de chantiers définis. Elle permet la couverture par les assurances et le développement de l’expérimentation dans l’attente d’un véritable avis technique.
4. Les certifications et les marquages :
Trois grands types de certification sont à distinguer :
- la certification de produits ou de services : elle atteste que les caractéristiques d’un produit ou d’un service sont conformes à des spécifications techniques souvent normalisées ;
- la certification d’entreprises : elle atteste la conformité du système qualité d’une entreprise à un référentiel normalisé -(normes de la série ISO 9000) ;
- la certification de personnes : elle atteste la compétence de professionnels au regard de critères préétablis.
La certification de produits industriels est un acte volontaire du fabricant ayant pour objet d’attester, au moyen d’un certificat de qualification délivré par un organisme tiers et indépendant, qu’un produit industriel ou un bien d’équipement est conforme à un référentiel préétabli comprenant des normes ou des spécifications techniques déterminées par les professionnels.
La certification engage le fabriquant sur le suivi et les contrôles permanents de conformité du produit avec les mentions de la certification. L’organisme certificateur est assisté par un secrétariat technique qui peut être le même organisme ou un organisme différent. Ce secrétariat définit et réalise les essais et assure l’élaboration et le suivi du dossier de certification.
5. les labels :
Un label est ’une attestation de qualité délivrée par un organisme officiel ou professionnel à un matériau, à un composant ou à un ouvrage qui satisfont à des normes définies’.
Les labels, les référentiels, les certifications, les marquages, les classements sont des outils attestant que des produits, systèmes, services sont conformes, répondent à des normes, des cahiers des charges. Ils permettent d’atteindre un niveau de qualité, de performance, de durabilité et parfois au delà des minima imposés par la législation et la réglementation (cas des Labels). Ils ne sont pas obligatoires et font partie d’une démarche volontaire des fabricants, entreprises, maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage.
[1] Les normes Françaises sont élaborées et diffusées par l’Association Française de Normalisation (A.F.N.O.R.) qu’est l’organisme officiel français de normalisation, membre de l’Organisation internationale de normalisation (ISO) auprès de laquelle elle représente la France. Elle est devenue un groupe international de services organisé autour de quatre domaines de compétences qui sont la normalisation, la certification, l’édition spécialisée et la formation.
[2] Le CEN : Comité européen de normalisation, et le CENELEC : Comité européen de normalisation électrotechnique.
[3] « document établi par consensus et approuvé par un organisme reconnu, qui fournit, pour des usages communs et répétés, des règles, des lignes directrices ou des caractéristiques, pour des activités ou des résultats, garantissant un niveau d’ordre optimal dans un contexte donné », Dictionnaire Permanent de la construction, feuillet 138, N°3.
[4] Les premiers Eurocodes publiés ont le statut de normes expérimentales (ENV). Avant publication, ils sont complétés par des documents d’application nationale (DAN) qui permettent de faire le lien avec les règles actuelles, pour une utilisation volontaire. Après quelques années d’expérimentation, ces codes devraient être actualisés et transformés en norme EN, pour ensuite remplacer progressivement tous les textes nationaux.
[5] En effet les DTU ne visent que les aspects nécessitant de recevoir une expression contractuelle pour la réalisation des travaux, alors que les règles de l’art visent aussi le savoir faire propre à chaque corps de métier, ou les tours de mains propres à chaque profession et permettant aux professionnels de maîtriser la qualité de leur prestation.
[6] CSTB : Centre Scientifique et Technique du Bâtiment est un établissement public français à caractère industriel et commercial (EPIC), créé en 1947 aux fins d’accompagner la reconstruction d’après-guerre en France. Il est placé sous la tutelle du Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer.